[Vie nocturne] La Ville de Lille durcit le ton dans le secteur Solférino-Masséna, on fait le point

"La bamboche n'est pas finie mais elle doit être responsable et respectueuse", a martelé Arnaud Deslandes. Pendant une conférence organisée ce jeudi 22 mai, le maire de Lille et le préfet du Nord Bertrand Gaume ont détaillé un ensemble d'actions établies dans le secteur Solférino-Masséna.

Des mesures très attendues par les riverain·es qui se sont formés il y a quelques années en collectif, et qui n'ont cessé de remonter aux autorités les débordements des rues de la soif du secteur : violences, agressions, insalubrité, nuisances sonores, etc. "Nous ne sommes pas restés inactifs jusqu'à présent, mais la situation n'est pas satisfaisante. Il fallait agir plus fort que ce que nous faisions", concède Arnaud Deslandes. 

Et ce qui est mis en place sous la forme d'une expérimentation, pourrait bien bouleverser les habitudes des noctambules, des riverain·es et des patron·nes de débits de boissons et de commerces de vente d'alcool à emporter. 

Une présence policière renforcée

Désormais, tous les jeudis, vendredis et samedis de 23h à 6h du matin, 7 policiers municipaux et 6 policiers nationaux seront présents en point fixe pour des rondes pédestres dans le secteur (notamment place des Halles), et qui viendront en appui des 7 caméras installées dans le secteur. "C'était une demande récurrente", indique le maire de Lille. "Et ça ne veut pas dire qu'il n'y aura plus de contrôles mobiles", assure le préfet du Nord qui intègre le conseil de la vie nocturne.

Mise en place jeudi 16 mai, cette présence fixe a permis selon la Ville : 

• 63 verbalisations pour des infractions au code de la route,
• 17 interpellations pour conduite sous emprise d'alcool,
• 11 immobilisations de véhicules,
• 21 interventions pour mettre fin à des bagarres ce qui a conduit l'évincement de 46 personnes,
• plusieurs verbalisations pour des mictions sur la voie publique,
• 7 verbalisations et 2 rapports à l'encontre d'établissements pour tapage ou non respect des horaires.

4 médiateur·rices pour assurer le dialogue

En plus de la police, 4 médiateur·rices seront également présent·es entre minuit et 3h30 pour "assurer le dialogue auprès des noctambules, mais aussi auprès des établissements pour faire la médiation entre les riverain·es et eux." Déployé·es sur le secteur Solfé-Masséna "prioritairement", iels pourraient être appelé·es pour d'autres rues de la Soif.

Trois nouvelles interdictions 

Par arrêtés municipaux, la mairie a interdit :

• la consommation d'alcool sur la voie publique (hors terrasses) dans les rues de la Soif du secteur, tous les jours de 20h à 3h du matin → 150€ d'amende
• La vente d'alcool à emporter, tous les jours de 22h à 7h (épiceries de nuit et débits de boissons) → jusqu'à 500€ d'amende
• La détention, l'utilisation, l'abandon, la cession et la revente de gaz de protoxyde d'azote (gaz hilarant) sur la voie publique, dans les parcs et jardins ouverts → 150€ d'amende

Si la troisième mesure concerne toute la ville, les deux premiers concernent spécifiquement Solfé-Masséna :  

• la place de Strasbourg,
• la rue Nationale jusqu’à la rue de Solférino,
• la rue de Solférino jusqu’à la rue Jean-Sans-Peur,
• la rue Jean-Sans-Peur jusqu’à la rue Jacquemars-Giélée,
• la rue Jacquemars-Giélée jusqu’à la place de Strasbourg.

Une première évaluation du dispositif fin juin 

Toutes ces mesures seront évaluées au sein d'une "celulle de veille spéciale" avec un premier bilan fin juin. "Pour l'instant, nous nous réservons la possibilité d'expérimenter la piétonnisation de la rue Masséna à plus tard, le temps d'évaluer les impacts de ces mesures", indique Arnaud Deslandes, qui prévoit aussi le réaménagement du parking des Halles en ne laissant plus qu'une seule entrée plutôt que deux, "pour éviter les runs".

Qu'en pensent les concerné·es ?

Pour le collectif de riverain·es, "c'est tout ce qu'on attendait depuis longtemps, on est plus que ravis et rassurés. On partait de loin et jamais des décisions aussi grosses n'ont été prises avant. On verra l'efficacité du dispositif mais on n'est pas trop inquiets."

Les patron·nes de bars interrogé·es sont content·es à l'unanimité de la décision concernant le gaz hilarant, mais pour le reste, les avis varient : 

• "Ce n'est que du bien", se réjouit Eli Chahine, le patron du Magnum et du Joy. Ça va apaiser le quartier et faire partir les parasites qui ne nous posent que des problèmes et qui ne sont même pas des clients." 
• Pour d'autres, ces mesures "stigmatisent encore plus le quartier" et risquent de "faire baisser encore plus" la fréquentation, déjà impactée par les travaux. Jérôme d'O'Scotland s'interroge : "pourquoi il n'y a pas la même chose dans les autres rues de la Soif comme la rue Royale, où il y a aussi des problèmes ?"
  
• D'autres encore tempèrent : "ce n'est pas comme si l'interdiction de la consommation sur la voie publique n'était pas déjà interdite", sourit un autre patron qui souhaite rester anonyme.

Pour les noctambules interrogé·es, l'interdiction du gaz hilarant est une bonne chose à l'unanimité, en revanche l'interdiction de consommer de l'alcool sur la voie publique inquiète. "Est-ce que ça veut dire que si je suis avec mon verre debout devant le bar, je vais me taper une amende ? J'espère qu'il y aura quand même une forme d'indulgence." L'avenir nous le dira.