" - Combien payez-vous de loyer par mois ? - Très cher." C'est la réponse qu'on obtient à chaque fois qu'on pose la question à des nouveaux commerçant·es de Lille, notamment dans le centre et dans le Vieux-Lille. Et pour celles et ceux qui mettent la clé sous la porte comme Canard Street ou qui connaissent des difficultés financières comme Grand Scène, le loyer revient constamment dans les causes citées.

"Faut-il attendre que les derniers commerçants indépendants désertent le centre-ville pour que les autorités réagissent enfin ?", réagit Juliette Sgarbi, la gérante de Coco Friendly et lanceuse d'une pétition sur Change.org, qui réclame un encadrement des loyers commerciaux. "Entre 2019 et 2025, mon loyer a augmenté 2000€ par mois, calcule la commerçante de la rue de la Vieille Comédie dans le Vieux-Lille. Je ne peux plus me dégager de salaire et 85% de mon chiffre d'affaires part dans les charges. Alors que proportionnellement dans ma boutique à Paris, le loyer est moins cher." Elle a bien tenté de faire baisser le prix auprès de son "propriétaire millionnaire" mais le refus est catégorique. Et comme on vous l'a dit, elle est loin d'être la seule dans ce cas-là.
Qui gère l'encadrement des loyers commerciaux ?
Dans sa pétition adressée au maire de Lille Arnaud Deslandes, Juliette demande "de prendre des mesures concrètes pour encadrer les loyers commerciaux à Lille, et ainsi protéger l'économie locale, la diversité commerciale, et l'identité même de notre centre-ville." Pétition signée pour l'instant par un peu plus de 1040 personnes et soutenue par pas mal de ses congénères lillois·es.
Mais que peut faire la mairie sur le sujet ? Car comme pour l'encadrement des loyers d'habitation, celui des locaux commerciaux ne peut être mis en place que par voie législative. Donc portée par le gouvernement ou un·e député·e. "Il faut que la mairie continue de pousser le dossier et nous donne des informations sur où ça en est", souhaite Juliette.
Les tentatives fructueuses de la Ville de Lille
À savoir que la vacance commerciale était "le grand combat" de Martine Aubry, et que la mairie de Lille porte cette requête depuis 2017. En 2022, elle alertait la Première Ministre Élisabeth Borne, jugeant les loyers commerciaux "très élevés et déconnectés de la commercialité qui exigent un taux d'effort trop important de la part des commerçants et font de Lille l'une des villes les plus chères de France". Un débat devait être mené en mars 2025 pour lancer une expérimentation. Mais depuis, plus de son, plus d'image.
Alors la mairie tente d'agir à plus petite échelle, en attendant que les choses bougent. "On vient à la "reconquête" des étages pour en faire des habitations", commence Franck Hanoh, adjoint au maire en charge du commerce. Cela permettrait en effet de faire baisser certains loyers dont les étages sont inclus d'office, et parfois inutilisés et délabrés. Mais le cas par cas est loin de suffire.
La Ville a aussi essayé de parler aux gros propriétaires... sans succès. "Arnaud Deslandes a rencontré pas mal de propriétaires fonciers pour leur demander d'être moins gourmands. Il a reçu une fin de non-recevoir, indique l'adjoint au maire. C'est pour ça que la seule solution, c'est de légiférer."
Pour ça, Franck Hanoh déclare relancer le processus de demande d'expérimentation en septembre. "Ma seule peur, c'est que mon interlocuteur change encore", faisant référence aux quatre remaniements du gouvernement, rien que pour l'année 2024. Affaire à suivre.